Ouvrage du Simserhof à Siersthal

Se succédant le long de la Schwalb, le village de Siersthal et ses écarts Frohmühl et Holbach sont situés en pays couvert, dans la zone où la forêt est largement trouée par les essartages, seul le hameau du Légeret se situant sur le plateau. Le confluent de la Schwalbbach et du Schwangerbach a favorisé l'implantation du village, aujourd'hui niché au cœur des forêts qui ont envahi les versants. Le patrimoine religieux du village est très riche, puisqu'il possède la magnifique église Saint-Marc, érigée au XVIIIe siècle à flanc de coteau et possédant un mobilier baroque exceptionnel, la chapelle de la Très Sainte-Trinité de Frohmühl, datant du XVIIe siècle, ainsi que le sanctuaire marial dominant le village de Holbach depuis 1946, sans oublier les nombreux calvaires et croix de chemin parsemant le ban communal et le rocher du Bild. En ce qui concerne le patrimoine militaire, le hameau du Légeret a la part belle car il doit son nom au responsable de la fortification de la cité bitchoise, rôle qu'il étoffera encore lors de la construction à ses pieds de l'imposant ouvrage du Simserhof, fort invincible de la ligne Maginot.

Table des matières

II. Notes et références III. Annexes                                                
 


L'entrée des hommes du fort du Simserhof se situe plus en hauteur. Les anciens wagons, danx la clairière devant l'ouvrage. La sortie de la visite du fort.

I. Histoire

Le fort du Simserhof est construit de 1929 à 1936 et constitue l'un des ouvrages de l'ensemble fortifié appelé la ligne Maginot, mis en place dans le cadre de l'organisation défensive des frontières Nord et Nord-Est de la France. Le gros ouvrage d'artillerie du Simserhof est la pièce maîtresse du secteur fortifié de Rohrbach-lès-Bitche, entre la Sarre et les Vosges du Nord. Situé à quatre kilomètres à l'Ouest de Bitche, l'ouvrage doit son nom à l'ancienne ferme du Simserhof qui se trouvait à proximité. Seize mois d'étude, du 7 juin 1929 au 16 septembre 1930, et trois réunions plénières de la CORF sont nécessaires pour mettre en place les plans de construction de cet ouvrage.

1. Construction de l'ouvrage

Un premier projet, en date du 7 juillet 1929 et émanant du Colonel Frossard, prévoit la construction d'un fort concentré de cinq blocs distants de cinquante mètres en moyenne l'un de l'autre. L'ouvrage doit être entouré d'un fossé antichar avec des coffres de défense. L'entrée doit être édifiée dans un ravin arrière, avec une voie ferrée étroite (voie de 60). Ce projet est examiné le 1er juillet 1929 par les généraux de la Commission d'Organisation des Régions Fortifiées et de nombreuses objections sont formulées : ce projet nécessite de grands déboisement et la structure dispose d'un champ de tir insuffisant (les pentes trop fortes vers les vallées profondes de Schorbach et de la Horn sont mal battues par les canons de 75 mm ; la défense rapprochée manque de champ de tir vers la droite (Est) et en avant (Nord) ce qui provoque des angles morts exploitables par l'assaillant). Ce projet est rejeté et le 8 juillet 1929, une reconnaissance est effectuée sur le terrain pour trouver une solution à la construction de cette forteresse.

Un second projet est alors annoncé le 12 juillet de la même année. Il prévoit la construction de deux ouvrages distincts de trois-cents mètre l'un de l'autre et se flanquant mutuellement. Ce projet engendre l'augmentation des estimations mais est tout de même adopté par la CORF puis par le Maréchal Pétain le 21 septembre 1929. Le plan d'étude d'implantation est discuté de mars à septembre 1930. Quelques modifications sont adoptées au projet du 12 juillet 1929, ce qui engendre une nouvele hausse des coûts. Le prix la construction était estimé à 62 millions de francs d'époque alors que les crédits étaient de 38 millions de francs. Il est décidé de construire huit blocs bétonnés et l'entrée est dédoublée (une entrée des hommes et une entrée des munitions). La construction du Simserhof s'étale sur près de 9 ans, de 1929 à 1938. Le gros œuvre est réalisé de 1930 à 1933. 2 000 personnes sont engagées sur ces chantiers de jour comme de nuit. L'année 1933 marque la fin du gros œuvre. Une partie de l'équipement est mise en place (tourelle : blocs 3, 4 et 8). En 1934, l'usine électrique, les monte-charges et les réseaux de câbles sont mis en place, ainsi que le réseau ferroviaire. En 1937, le champ de rail antichar continu est implanté et à partir de 1938, l'ouvrage est prêt à fonctionner. Il aura coûté au total 118 millions de francs (30 millions d'euros).

Une des cuisines de l'ouvrage. Une galerie du fort. L'entrée du matériel.

2. Vie dans l'ouvrage

Le Simserhof était occupé par un équipage composé de 876 hommes, issus du 3e bataillon du 153e Régiment d'Infanterie de Forteresse (RIF), du 7e bataillon du 155e Régiment d'Artillerie de Position (RAP) et des éléments des 1er, 15e et 18e Régiment du Génie. Le commandement de l'ouvrage est confié au lieutenant-colonel Aumoitte, du 10 avril 1938 au 12 février 1940, puis c'est le lieutenant-colonel Mauvin qui prend en main l'ouvrage, avant de laisser sa place au lieutenant-colonel Bonlarron, à partir du 25 avril 1940. En temps de paix, les troupes d'active, affectées au Simserhof, étaient stationnées dans le casernement du Légeret, fraîchement sorti de terre et qui offraient des bâtiments neufs et confortables. L'état-major du régiment résidait à la caserne Jouart, à Bitche.

L'ouvrage du Simserhof était composé, comme tous les ouvrages de la ligne Maginot, de deux parties distinctes : une partie arrière et une partie combat. On accédait à la partie arrière par deux entrées : une entrée homme (EH) et une entrée munitions (EM). Dans cette partie de l'ouvrage, on retrouvait le casernement (lieu de vie des soldats), les cuisines, l'usine électrique et le magasin à munition (M1). Les blocs de combats se trouvaient à 1800 mètres de l'entrée de l'ouvrage. Une étroite cohabitation s'est instaurée entre les troupes de forteresse et les habitants de la région. Le 17 mai 1936, la ville de Bitche remet ses fanions au 153e Régiment d'Infanterie de Forteresse et le 20 septembre 1936, c'est au tour des commerçants et du syndicat d'initiative de remettre leurs fanions aux batteries d'ouvrage. La vie à l'intérieur de l'ouvrage était calquée sur celle des navires de guerre. Un service par quart rythmait la vie l'occupation des locaux :

Les troupes enfermées dans le fort n'avaient plus la notion du temps. La vie n'était pas réglée en fonction du jour et de la nuit mais par rapport aux heures de quart. Pendant la Drôle de guerre, le secteur était calme. Quotidiennement, des séances d'éducation physique avaient lieu. Les éléments non affectés à leur poste s'affairent dans les blocs à l'entraînement quotidien et à l'entretien. Fin septembre, le commandement de l'ouvrage autorise l'équipage à prendre l'air devant la grille de l'entrée des munitions. Certains frontaliers, munis d'un sauf-conduit, peuvent même aller à Bitche afin de vérifier l'état de leur maison. Des mises au vert dans des villages proches étaient organisées et des exercices de tir rompaient l'attente quotidienne. À partir de fin novembre, des permissions de 10 jours étaient accordées par roulement.

Il n'y avait pas de rassemblement de tout l'équipage, excepté pendant la messe du dimanche, célébrée par le sergent Thiéry dans la gare du magasin à munition M1. Il était interdit de circuler dans les galeries. Des efforts furent déployés pour améliorer le quotidien des soldats. Au Simserhof, des fresques ornent les murs de la forteresse. Le soldat Simon, décorateur de théâtre à l'Opéra de Paris, orna le foyer-bar, dans le casernement, de fresques représentant Blanche-Neige et les Sept Nains. Malgré ces efforts, la vie sous terre entraîne une sensation indéfinissable que les équipages vont appeler la bétonite. L'absence de lumière solaire, de différence entre le jour et la nuit, l'exiguïté des locaux affectent le moral de ces soldats.

Un dortoir pour les hommes de troupe. L'entrée du matériel. Les fresques, représentant Blanche-Neige et les sept nains, sont réalisées par le soldat Simon, décorateur de théâtre à l'Opéra de Paris. Des promeneurs découvrent le fort en suivant le sentier de la ligne Maginot, balisé par le Club Vosgien.

3. Combats du Simserhof

Occupé en mars 1936, dans des conditions d'habitabilité relativement mauvaises, le Simserhof est à nouveau investi par les troupes de forteresse en septembre 1938 (Munich) et en mars 1939. La prochaine occupation sera la bonne. Le 21 août 1939, la mesure num. 10 est décrétée (occupation des ouvrages). Vers 23 heures, l'active est à son poste et l'ouvrage est opérationnel. Le 24 août, les réservistes frontaliers ont un délai de 18 heures pour rejoindre les ouvrages. Ils arrivent à l'ouvrage du Simserhof où ils sont habillés et équipés. Le 2 septembre, c'est la mobilisation générale et le 3, l'état de guerre est proclamé. Le Simserhof doit intervenir une première fois le 12 octobre. Une tourelle de 75 intervient au profit des avant-postes installés à une dizaine de kilomètres en avant de la ligne fortifiée. Le 10 mai 1940, Hitler lance la Blitzkrieg à l'Ouest, mais devant la ligne Maginot le front reste calme. Le 12 mai 1940, les avancées son violemment bombardées et le Simserhof riposte pour appuyer les troupes françaises.

Le 13 juin, les troupes d'intervalles se replient vers le Sud de la France. Le Simserhof doit protéger ces troupes puis l'équipage devait quitter l'ouvrage en le sabotant. À partir du 1er juin, le Simserhof effectue des tirs de protection et le 16 juin 1940, le lieutenant-colonel Bonlarron comprend que le mouvement de retraite est quasi-impossible. Il décide de ne plus saborder l'ouvrage et prend des dispositions pour soutenir un siège. Les Allemands approchent. À partir du 21 juin, l'artillerie du Simserhof est en action. Il faut éviter que l'ennemi se présente trop près de l'ouvrage du Welschhof. Le 22 juin 1940, le Simserhof assiste, impuissant, au drame du Haut-Poirier, qui doit se rendre avec cinq casemates et le 22 juin 1940, un armistice est signé entre le Maréchal Pétain et une délégation allemande.

Le 24 juin, le vent change ; la situation du Welschoff se dégrade brutalement. Il doit se rendre. Ce même jour, le Simserhof doit protéger l'ouvrage de Rohrbach-lès-Bitche - le fort Casso - qui est attaqué par les Allemands. Le Simserhof aura tiré quelques 13 500 obus pour la protection de cet ouvrage.Au soir du 24 juin, l'équipage du Simserhof apprend, par la radio suisse, l'armistice avec l'Italie. Dans les clauses de l'armistice, l'article 7 prévoyait que les ouvrages doivent être remis intacts à l'autorité allemande. Le sort des équipages reste ambigu. Les Allemands tentent de négocier avec les ouvrages mais ils sont à chaque fois renvoyés. Les commandants d'ouvrages attendent un ordre de l'état major français. Le 30 juin 1940, le lieutenant-colonel Simon vient apporter aux commandants d'ouvrage l'ordre de livrer leurs ouvrages aux vainqueurs. La rencontre a lieu au Grand-Hohekirkel.

Huit jours après l'armistice et cinq jours après le cessez-le-feu, le Simserhof dépose les armes et un détachement allemand rend les honneurs à l'équipage invaincu qui est emmené en captivité. Les Allemands sont maîtres de l'ouvrage. La maintenance est assurée par quelques officiers et techniciens de l'équipage. L'ouvrage du Simserhof sert de stock de torpilles, pendant la Seconde Guerre mondiale. Fin novembre 1944, les Alliés (7th Army du général Patch) se heurtent à la résistance des Allemands, dans la région et à partir du 15 novembre, la 100th Division prend d'assaut le Simserhof. Le bloc 5 du Simserhof est lourdement touché. Les Allemands abandonnent le Simserhof indéfendable, par une sortie de secours après avoir piégé les installations, dans la nuit du 19 au 20 novembre. Les troupes alliées occupent l'ouvrage mais dans les premiers jours de l'année 1945, Hitler lance sa contre-offensive l'opération Nordwind et les Américains sont contraints de quitter le fort. Le 15 mars 1945, les Américains reviennent, mais les Allemands ne peuvent utiliser le Simserhof. Bitche est définitivement libérée le 16 mars.

L'entrée du matériel. L'infirmerie du fort.

II. Notes et références

III. Annexes

1. Bibliographie

2. Liens internes
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