Et puis, il faut
attendre les années 1730 et les premières
reconstructions d'églises pour être à
nouveau bien renseigné sur la fabrication du mobilier
religieux, installé souvent peu de temps après,
et sur les sculpteurs qui l'ont réalisé. Des
autels, des tabernacles et des retables en bois polychrome et
doré ont été attribués au
sculpteur
Jean Martersteck
(1691-1746), originaire de Bouquenom (aujourd'hui Sarre-Union, dans le
Bas-Rhin), venu s'installer en 1735 à
Wœlfling-lès-Sarreguemines, aux portes du
Pays
de Bitche. On lui doit sans doute le retable d'
Epping
actuellement dans la
chapelle
d'Urbach, le maître-autel et la chaire
à prêcher des églises de
Rimling
et de
Loutzviller,
les retables
des trois autels de
Rahling,
signés et datés 1745, ainsi que le maître-autel
et l'autel latéral gauche de l'église paroissiale
de
Gros-Réderching
; quant à l'autel-retable de la chapelle d'
Olferding
fourni en 1755, il a disparu depuis bien des
années.
L'œuvre
de Martersteck,
fortement architecturée, est
caractérisée par
l'utilisation, dans les retables, de colonnes parfois
jumelées
ou placées en biais, encadrant des niches ou des tableaux.
L'entablement, sur lequel reposent des pots à feu ou
à
fleurs, est surmonté de frontons plus ou moins
développés, aux
rampants chantournés ou
encadrés d'ailerons. Le décor, doré
à la
feuille sur fond peint en blanc à
l'origine, est
répandu sur les devants d'autels, quand ils ont
été conservés, sur les gradins, les
ailerons et le
fronton des retables, sur les piédestaux des colonnes.
D'inspiration végétale et florale, il est souvent
mêlé à des rinceaux, des enroulements
ou à
des fleurons.
Au milieu du XVIIIe siècle, Théodore Saladin,
sculpteur à Freyming, fournit en 1757 l'autel de la chapelle
de
Bining
et, quelques années plus tard, Joseph Lintz, de Bouquenom,
le tabernacle de celle-ci, tandis que Jean-Claude Mercenier, originaire
d'Arlon, dans l'ancien duché de Luxembourg, sculpte le beau
devant d'autel représentant la Cène pour l'
église
de Loutzviller. Dans les années 1770-1780, les
paroisses voisines de
Rohrbach-lès-Bitche
et de
Gros-Réderching
font appel à un sculpteur de Sarrebourg,
Dominique Labroise (1728-1808), pour l'ameublement de leurs
églises. Il fournit les trois autels de Rohrbach
commandés en 1772 et l'autel avec la statue de sainte Agathe
pour celle de Gros-Réderching en 1776,
réalisé sur le modèle de l'autel de la Vierge. Sa production se distingue de celle de
Martersteck
par un élancement plus accusé des retables, par leur plan
galbé, une plus grande sagesse dans l'utilisation du
décor et par le développement exceptionnel des frontons
au contour très chantourné et timbré de roses.
À côté de ces sculpteurs sur bois, des
stucateurs sont mentionnés à plusieurs reprises
dans les comptes de fabriques au cours de la décennie
1770-1780 : André Moosbrugger, venu du Vorarlberg
et installé à Altroff, fournit en 1771 les trois
autels-retables d'
Achen
; les sculpteurs Jean-Philippe Mihm et Winibald Wagner, qui avaient
travaillé à la Cour de Sarrebruck sous
la direction de l'architecte Frédéric-Joachim
Stengel, réalisent à la même
époque les autels et la chaire à
prêcher de
Bettviller
et à partir de 1755 l'ensemble des trois autels et la chaire
de l'
église
Sainte-Catherine à
Bitche,
pour lesquels le stucateur Verschneider avait été
sollicité. À
Sturzelbronn (1775) et à
Soucht
aussi, les maîtres-autels ont
été commandés à des
sculpteurs en «
marbre artificiel ».
De toutes ces œuvres, bien peu subsistent aujourd'hui, sans
doute victimes, bien plus que le mobilier en bois, des destructions de
la guerre et des réformes liturgiques, mais elles
sont heureusement connues par des photographies. Il s'agissait d'autels
formés d'un tombeau fortement galbé et de
retables à colonnes, au plan incurvé,
avec un fronton très
développé encadré de consoles au
profil chantourné, le décor occupant les fonds du
retable et du fronton. Quant aux chaires, elles avaient une cuve
polygonale à la base fortement renflée et aux
arêtes soulignées par des chutes
végétales terminées par des volutes,
l'ensemble étant peint en faux-marbre.
Dans la première moitié du XIXe
siècle, les autels perpétuent la tradition du
XVIIIe siècle, comme le maître-autel de
Bining
commandé en 1819 au sculpteur Henri Güldner, de
Bérus (Sarre), [près de Creutzwald,] et les autels
latéraux acquis en 1842 par la fabrique, tous fortement
« embellis » à la fin du siècle et au
début de l'autre. Sur des tombeaux toujours
galbés le décor rapporté
s'étale en légers enroulements
végétaux, des chutes d'instruments liturgiques
ornent les ailes du tabernacle, tandis que les ailerons, plus
grêles, sont couverts d'un fond mosaïque.